lundi 15 mars 2010

J'ai fini Haruki Murakami, "La fin des temps",

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Ce roman dont je vous parlais vendredi, je l'ai fini la nuit dernière, vers 04h30 du matin (pas très raisonnable tout ça). Ce sont les lectures que je préfère, celles des nuits blanches, celles à perdre haleine, s'user les yeux, celles qui renouent avec l'adolescence et ses lectures interdites que l'on poursuit bien après l'heure du couvre-feu. Celles aussi qui me permettent d'oublier mon métier, après des années de fac et d'enseignement où on ne lit plus que le crayon à la main et des analyses structuralistes en tête.
Et donc le roman est fini, et comme toujours il y a ce sentiment délicieux et ambigu de plénitude et de frustration.

Il s'y ajoute le sentiment particulier que laisse tout roman de Murakami: le coeur en suspens et égratigné, car oui, bien sûr, il ne saurait y avoir de "happy end" ni même d'achèvement. Je me suis souvent dit que la beauté de l'œuvre de Murakami, et son courage, résidaient en grande partie dans ses fins qui "malmènent" le lecteur et lui laissent au cœur une plaie ouverte, lui refusant l'apaisement des dénouements topiques et l'illusion rassurante d'une réponse.
Peu de romanciers en sont capables.

Je ne vous parlerai pas ici de l'intrigue, ni de sa construction, ni même du thème du livre. Sans doute la lassitude de la prof de Lettres. Mais aussi, et plus sûrement, car ce ne serait pas l'essentiel. J'ai envie de parler d'autres choses, ce qui serait pourtant aussi parler de ce livre ; ou plutôt, de faire parler d'autres que moi.

Tout d'abord mon ami D., qui m'a laissé la dernière fois ce très beau commentaire sur un-certain-réseau-social où s'exhibe (un peu), ma "face" :
« Très belle évocation de l'univers de Murakami. Un univers où, comme tu l'écris si justement, le fantastique est plus un filigrane du quotidien qu'une rupture avérée dans l'ordre des choses. Un instant de distraction, de relâchement, et voilà que la réalité échappe à notre logique pour se réinventer dans un intervalle qui est celui de la poésie dans ce qu'elle a de plus absolu.
Pour revenir à "La fin des temps", j'ai acheté ce roman il y a quelques mois mais je ne l'ai pas encore lu. Je crois que j'attendais le moment propice. Chacun des rendez-vous que j'ai avec Murakami est tellement particulier que je ne voudrais surtout pas le manquer!
PS: "La solitude est un cercueil de verre", quel roman! Depuis que je l'ai lu il n'a jamais cessé de me hanter.  »

Je trouve cette expression particulièrement juste : "Un instant de distraction, de relâchement, et voilà que la réalité échappe à notre logique pour se réinventer dans un intervalle qui est celui de la poésie dans ce qu'elle a de plus absolu."

Ensuite Thomas Mann, dont La Montagne Magique a suscité en moi une émotion très proche de celle de l'univers de La fin du monde, bien que ces romans paraissent en théorie très différents.
Une émotion que je pourrai dire par ces vers d'Aragon:

"Le ciel était gris de nuages
Il y volait des oies sauvages
Qui criaient la mort au passage
Au-dessus des maisons des quais
Je les voyais par la fenêtre
Leur chant triste entrait dans mon être
Et je croyais y reconnaître
Du Rainer Maria Rilke.

Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent."

Enfin Apollinaire "J'ai tout donné au soleil/ Tout sauf mon ombre".
Ce motif de l'ombre dans "La fin du monde", qui réactualise le mythe d'Orphée, est tout simplement magnifique.

Tout ceci doit sembler quelque peu décousu. Sans doute les effets secondaires de ma nuit presque blanche et de la prose de Murakami.

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