dimanche 6 juin 2010

J'ai lu Orages ordinaires ( Ordinary Thunderstorms) de William Boyd

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Je pourrais dire que je l'ai commencé hier soir, vers 23h et fini un peu avant 05 h du matin, et cela suffirait...

J'ai toujours beaucoup apprécié W. Boyd, que ma mère m'a fait découvrir à l'adolescence ; Les Nouvelles Confessions contiennent une des plus belles scènes de lecture que j'ai jamais lues :

 "Karl-Heinz ne m’avait donné que le texte – j’ignorais le titre, j’ignorais l’auteur. Je ne savais rien du sujet du livre ni de son genre. Pourtant, assis là dans cette cellule, j’eus l’impression d’être à l’orée d’une merveilleuse aventure et de tenir entre mes mains fiévreuses quelque chose d’immensément précieux. Ce fut un instant divin. Il allait changer ma vie.
*
"Chapitre Un. "
Mon coeur battait follement d’impatience. La première phrase, le premier paragraphe...à quoi ressembleraient-ils ? Je lus :
" Je forme une entreprise qui n’eut jamais d’exemple et dont l’exécution [...] n’être fait comme aucun de ceux qui existent " Mon émotion fut telle qu’il me fallut reposer la page. Mon coeur se démenait dans ma poitrine, y battant à grands coups. [...] Mais jamais je n’ai lu un tel prologue à un livre, jamais je n’ai été aussi puissamment et immédiatement emporté. Qui était cet homme ? A qui appartenait cette voix qui m’interpellait si directement, dont l’impudeur effrontée retentissait de tant d’honnêteté sincère ? Hypnotisé, je poursuivis ma lecture
. "

J'ai aimé aussi Brazzaville Plage, La Croix et la Bannière, Comme neige au soleil, Un Anglais sous les Tropiques ...
Boyd est également un fantastique nouvelliste : Le Destin de Nathalie X , La femme sur la plage avec un chien et Visions Fugitives contiennent de véritables bijoux.

Orages ordinaires est un thriller londonien dans lequel j'ai retrouvé les qualités de cet écrivain : un déplacement léger du quotidien, un décalage subtil, qui en révèle alors toute la bizarrerie sous-jacente, l'étrangeté inhérente ; le goût assumé du romanesque et de la poésie du hasard ; des héros humains et imparfaits, des personnages secondaires autonomes, variés et très complets ; un humour très anglais, parfois loufoque (l'Église John Christ...)  ; un regard toujours juste et réactualisé sur l'époque ; beaucoup d'humanité, qui jamais ne tombe dans l'angélisme ni, à l'inverse, le cynisme ; une poésie des lieux, des gens et des choses à la quelle je suis très sensible : quelle belle idée par exemple que cet ensemenceur de nuages...
L'intrigue fonctionne bien par ailleurs, on se laisse prendre au suspens d'un thriller bien construit, capable aussi d'une vraie violence.
Il y a toujours une dimension cinématographique assumée chez Boyd (qui s'accomplit dans le beau personnage du cinéaste John James Todd des Nouvelles Confessions, et que l'on retrouve aussi dans  la chronique hollywoodienne que constitue Le Destin de Nathalie X ) : ainsi,  Orages Ordinaires m'a rappelé les meilleurs films des frères Cohen.

La "romance finale" m'a un peu moins convaincue, mais j'admets que cela fait partie des codes du genre ; et la fin ouverte parvient à maintenir le lecteur dans l'interrogation et à ouvrir l'espace du roman.

(Pour découvrir plus en détail les œuvres de William Boyd, je vous conseille cette page.)


Van Gogh, La liseuse de roman, 1888

1 commentaire:

  1. J'ai lu récemment l'après-midi bleu. J'ai un avis mitigé. Je ne connais pas celui-ci. Je note!

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